Le commerce international

Autur : Michel Rainelli
La Découverte, collection « Repères », édition 2009

Le développement des échanges internationaux de biens et de services est une caractéristique majeure de la mondialisation économique. Michel Rainelli, après avoir présenté les grandes tendances du commerce international sur une longue période, évalue la fécondité des principales théories explicatives. Il souligne que si elles sont plutôt favorables au libre-échange, le choix du protectionnisme peut se justifier dans certains cas. L’auteur analyse enfin l’impact des variations du taux de change et du développement des firmes multinationales sur le volume et la nature des échanges commerciaux. Il conclut sur une note d’inquiétude, constatant la persistance du déficit américain et la marginalisation de certains pays en développement.
Comment peut-on être protectionniste ?
Dans son ouvrage Le commerce international, Michel Rainelli propose une démonstration graphique simple de l’impact négatif du protectionnisme. Il mène une analyse en termes de surplus du consommateur et surplus du producteur et il montre que le protectionnisme se caractérise dans un petit pays par une perte-sèche pour l’ensemble de l’économie.

Graphiquement, cette perte-sèche est représentée par les zones b et d, qu’il appelle respectivement perte de distorsion de production et perte de distorsion de consommation. La zone a représente un transfert des consommateurs vers les producteurs et la zone c un transfert des consommateurs vers l’Etat. Cette démonstration toute simple repose sur une hypothèse de concurrence parfaite et est classiquement utilisée pour dénoncer le protectionnisme.
Dans un tel contexte, comment expliquer l’existence du protectionnisme et sa résurgence actuelle ? P. Cassagnard et D. Gouaux signalent trois facteurs structurels qui influencent la politique commerciale des nations :
-le degré de développement du pays:
En effet, selon la théorie dite du protectionnisme éducatif ou des industries naissantes (que l’on retrouve notamment chez l’Allemand Friedrich List dans son Système national d’économie politique de 1841), les coûts de production d’une « jeune » industrie sont nécessairement plus élevés que ceux de la concurrence étrangère en raison d’effet d’apprentissage ou d’économies d’échelle. En l’absence de protection, cela rend impossible le développement d’un secteur industriel dans un pays peu développé. Les deux économistes observent ainsi une corrélation globalement négative entre PIB moyen et niveau moyen de protection tarifaire et non tarifaire.

-la taille du pays:
Seconde régularité : les pays de petite taille, par le PIB, la population ou la superficie, sont tendanciellement les plus ouverts aux échanges internationaux. D’une part, parce que ses ressources sont insuffisantes pour satisfaire tous ses besoins, ce qui expliquent les flux d’importations de ces petits pays. D’autre part, le reste du monde représente un débouché majeur pour leurs exportations face à un marché intérieur de petite taille. Enfin, un petit pays est preneur de prix (ou price taker), ce qui signifie que la variation de sa demande adressée au reste du monde n’a pas d’impact sur le prix qu’elle obtient pour ses importations. Réduire ses importations ne permettrait pas de réduire leurs prix d’achat.

-l’accès aux marchés internationaux:
Il s’agit cette fois d’observer que plus un secteur est soumis à un protectionnisme de la part des partenaires commerciaux d’un pays donné, plus ce pays donné aura tendance à être lui-même protectionniste. Les politiques commerciales sont donc en interaction les unes avec les autres.

Dans son analyse des vertus comparées du protectionnisme et du libre-échange, M. Rainelli propose une explication plus politique du protectionnisme. La question posée est de savoir comment peut-on concevoir l’instauration d’une protection sachant que celle-ci ne génère pas d’effets bénéfiques. Il reprend la perspective développée par l’école dite du Public Choice autour de James Buchanan. Le point de départ de cette analyse est de considérer que les hommes et femmes politiques cherchent avant tout chose à se faire (ré)élire. Ils sont donc particulièrement sensibilisés aux opinions exprimées par leurs électeurs. Et parmi ces électeurs, se forment des groupes de pression regroupant des individus ayant des intérêts en commun. L’implication dans un groupe de pression suppose un certain nombre de coûts (par exemple, emploi de juristes et d’économistes, financement des campagnes électorales). Ces coûts de l’investissement dans le groupe de pression doivent donc être inférieurs aux bénéfices retirés de l’instauration de la politique envisagée. Or les gains du protectionnisme sont évidents pour deux catégories d’agents :
– les salariés du secteur menacé par les importations qui conservent ainsi leur emploi. 
– les actionnaires des firmes de ce secteur qui voient la valeur du capital investi se maintenir.

Et les gains que ces deux groupes retirent du protectionnisme sont plus importants et moins diffus que les gains que les consommateurs retirent du libre-échange (baisse du prix des biens importés). Il est donc plus vraisemblable que des groupes de pression en faveur du protectionnisme apparaissent plutôt que des groupes en faveur du libre-échange.


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